Abdoulaye SENE : "La question de la régionalisation est à l’ordre du jour un peu partout sur la planète"

La question de la régionalisation est à l’ordre du jour un peu partout sur la planète. Deux priorités expliquent cette tendance. Celle d’une modernisation de l’État – vers un État plus stratège – pour plus d’efficacité démocratique, sociale, économique dans le cadre d’une rationalisation budgétaire contrainte et d’une gouvernance à multi-niveaux, et celle d’une reconnaissance et d’une valorisation des identités comme contribution à la paix et à l'unité nationale, notamment dans les pays multiculturels.
Pour répondre à ce défi, il ne suffit pas d’adopter une constitution régionaliste. Ce qui est décisif, c’est la capacité démocratique à développer une culture du dialogue et du consensus - un atout de la culture africaine - ou compromis, une culture politique basée sur le respect de la diversité qui ne confonde plus unité et uniformité, identité et communautarisme.
Même si la moitié des États européens sont encore construits sur le mode unitaire, la France reste le grand État le plus centralisé avec une macro-encéphalie parisienne. L’actuel gouvernement français a, néanmoins, proposé une régionalisation plus poussée avec une réorganisation territoriale.
Dans le même temps, mais pas de la même manière, d’autres États européens, mais aussi plusieurs gouvernements africains, notamment au Mali et en Côte d’Ivoire, ont choisi de lancer une réflexion fondamentale quant à l’opportunité d’adopter ou développer une régionalisation à la suite de la crise politico-sécuritaire de 2012.
Une "coopération décentralisée" renouvelée, et mieux partagée, avec la reconnaissance de l'approche territoriale et non plus seulement sectorielle et fragmentée, pourrait constituer un atout supplémentaire.
La référence française intéresse, mais l’ouverture à d’autres expériences s’impose dans un monde où local et global interagissent de plus en plus, y compris dans le cadre d’organisations comme l’Union africaine ou l’Union européenne, là où les concepts se croisent et s’imprègnent réciproquement, comme au sein de l'OCDE (et de son Centre de développement) et du Conseil de l'Europe.
Voilà pourquoi les États africains et européens, avec leurs grandes associations de collectivités territoriales et leurs organisations régionales, ont tout intérêt, en respectant l’histoire et le caractère propre de chaque pays, à partager cette réflexion sur la régionalisation et la modernisation de l’Etat. Avec l’appui de la coopération suisse – une référence première – Global local forum s’est lancé, et avec d’autres, dans un benchmark analytique qui pourrait servir à l’élaboration des politiques et stratégies de régionalisation-décentralisation, en Afrique et ailleurs...
Abdoulaye SENE
* Lien avec le l'atelier de benchmark sur la régionalisation ; Régionalisation en Afrique de l'Ouest